15

 

 

Marco réveilla Feenie peu après l’aube, lui déposa une tasse de café dans les mains et la traîna jusqu’à la salle de gym. Malgré ses blessures toutes fraîches, il n’avait aucune intention d’aller plus doucement avec les haltères ou le ballon d’exercice et, dès qu’elle fut assez réveillée pour avoir les idées claires, elle se sentit curieusement en forme. La soirée de la veille avait même plutôt ravivé sa motivation. Elle éprouvait désormais plus que jamais le besoin de se défendre. Elle n’avait pas repéré la Blazer sombre depuis mardi, mais ça ne voulait pas dire que l’homme de Josh ne rôdait pas quelque part. Et si les Garland découvraient qu’elle avait suivi leur petite expédition de pêche, alors ils s’emploieraient par tous les moyens à la faire taire définitivement.

Tandis que Marco pratiquait des prises sur elle, les pensées de Feenie dérivèrent, et elle lista tous les moyens possibles dont le tueur à gages de Josh pourrait tenter d’user pour se débarrasser d’elle. Une balle semblait être la méthode la plus simple, mais Marco semblait convaincu qu’il avait d’autres plans.

Elle atterrit sur le dos avec un bruit sourd et il baissa les yeux vers elle, les sourcils froncés.

— Tu n’es pas concentrée.

Elle se releva et se pencha en avant pour reprendre son souffle.

— Désolée. Je suis distraite.

Il haussa un sourcil et lui jeta un regard entendu. Il devait supposer qu’elle pensait au sexe, et elle décida de ne pas froisser son ego.

— Bon, qu’est-ce que tu dirais de faire encore dix minutes et de s’arrêter ? dit-il à voix basse. On peut faire un saut chez moi avant d’aller au champ de tir.

Elle déchiffra l’expression dans ses yeux et son estomac se serra. Cecelia avait raison quand elle disait que Feenie avait besoin d’une aventure. La nuit dernière avait été incroyable. Le problème, c’est que le terme « aventure » ne décrivait pas totalement ce qu’ils faisaient ensemble. Les choses semblaient sérieuses. Beaucoup trop sérieuses pour s’arrêter après une nuit ensemble, voire même deux.

Mais peut-être était-ce sa perception des choses à elle. Peut-être que pour lui, tout ça n’était qu’une histoire de sexe. Feenie devait éviter de se retrouver seule avec lui jusqu’à ce qu’elle ait mis certaines choses au clair.

— En fait, je meurs de faim, dit-elle. Pourquoi on se doucherait pas ici et on irait pas prendre un petit-déjeuner ? À quelle heure ouvre Rosie ?

Il sembla blessé pendant un instant, mais reprit vite le dessus.

— T’as retrouvé ton appétit, hein ? C’est bien.

Il jeta un coup d’œil à sa montre.

— Rosie a ouvert il y a un quart d’heure.

Une fois devant une assiette de migas et du café, elle décida d’aborder le sujet qui la tracassait depuis les huit dernières heures.

— Qu’est-ce que tu prévois de faire avec les preuves ? demanda-t-elle.

Il enfourna une cuillerée d’œuf.

— Les preuves ?

— Les bandes, les photos. Tout ce que tu as récolté la nuit dernière.

— Les photos ne donneront probablement rien. La bande est bonne, mais ça ne suffit pas à faire une vraie différence.

Elle reposa sa fourchette.

— Qu’est-ce que tu veux dire ? On a été témoins d’un transfert, de nos propres yeux ! Tu l’as enregistré ! Qu’est-ce que tu veux de plus ?

Il baissa les yeux sur sa nourriture.

— La bande audio est bien, mais pas concluante. Il nous faut plus que ça.

Elle se renversa dans sa chaise et croisa les bras.

— Je ne suis pas d’accord.

Euphémisme de l’année.

— Je dis qu’on doit aller voir les flics sur-le-champ et leur donner tout ce qu’on a. Peut-être qu’ils pourront obtenir un mandat de perquisition et en savoir plus.

Il se pencha vers elle.

— Est-ce que tu as oublié ce que je t’ai dit à propos des flics ? Et les deux Garland ont des relations au sein de la communauté juridique, aussi. Il me faudrait presque un pistolet encore fumant avec les empreintes de Josh dessus pour pouvoir obtenir un mandat de perquisition et fouiller chez lui. Les autorités locales sont hors du coup.

— OK, très bien. Va voir le FBI. L’immigration. Quelqu’un qui peut faire quelque chose. On ne peut pas rester les bras croisés.

Il continuait de manger.

— Marco ?

— On ne reste pas les bras croisés. On enquête. Ça veut dire qu’il faut être patient. Ça prend du temps de rassembler toutes les pièces. J’ai passé deux ans là-dessus, et je n’ai pas l’intention de tout faire sauter en bâclant tout à la dernière minute.

— Deux ans et tu n’as pas assez de preuves ? Je marche pas. Pour qui tu travailles, d’ailleurs ?

— Je te l’ai dit. Pour des gens qui pensent que Garland est responsable de la mort de leur proche.

— Oui, mais qui ?

Il crispa la mâchoire.

— C’est confidentiel.

Incroyable. Ça lui allait bien qu’elle risque sa vie pour trouver des informations, mais il ne jugeait toujours pas bon de lui donner les détails.

— Ouais, eh ben j’imagine qu’ils commencent à s’impatienter, dit-elle. Ou peut-être qu’ils sont d’accord avec le fait que tu exploites ça pour ce que ça vaut. Tu es probablement payé à l’heure, c’est ça ?

Son regard se durcit.

— Fais gaffe à toi.

Son appétit avait disparu et elle repoussa son assiette.

— Et les filles ?

— Quoi, les filles ? On a aucune idée de qui elles sont ou de l’endroit où elles sont allées.

— Elles sont sûrement entre les mains d’un maque en ce moment. Et c’est des enfants ! Comment tu peux laisser faire ça ?

Il lui serra les mains.

— Je ne laisse rien faire du tout. Mais on poursuit quelqu’un de riche qui a des foutues relations partout. Lui et celui avec qui il travaille, qui que ce soit, ont tellement de personnes à leur botte que tu n’y croirais même pas. Alors on a une chance de redresser la situation, ou bien c’est deux ans qui tombent à l’eau et nos têtes mises à prix. Il nous faut plus de preuves.

Elle le regarda à travers la table. Un point pour lui, certainement. Josh ferait n’importe quoi pour discréditer les preuves contre lui, et il essaierait très certainement de punir quiconque remettrait sa réputation en question. Quelques semaines auparavant, elle aurait pris une « punition » pour un procès ou une campagne de diffamation. Désormais, elle savait qu’il était capable de bien pire.

— Tu ne crois pas qu’il soit possible que Josh sache que tu enquêtes sur lui ? demanda-t-elle. Et s’il y avait un contrat sur toi ?

Il la regarda un instant mais, comme d’habitude, elle était incapable de savoir ce qu’il pensait.

— Je prends des précautions, répondit-il, n’ayant manifestement pas l’intention de lui donner de détails.

Elle leva les yeux au ciel. Pourquoi fallait-il toujours qu’il soit aussi évasif ?

— De quel genre de preuve tu as besoin ?

Il lui lâcha la main.

— Mon plus gros problème maintenant, c’est l’argent. J’ai de bons arguments quant au trafic de drogue, surtout avec la bande d’hier. Mais je ne peux pas en prouver l’étendue. J’ai besoin d’un état financier, de relevés bancaires. Tout ce qui peut prouver qu’il y a ses empreintes sur l’argent.

Des relevés bancaires. Le genre d’information que le comptable de quelqu’un aurait en sa possession – ou l’ancien comptable.

— Et si on met la main sur ces documents, en supposant qu’ils existent, à ce moment-là, est-ce qu’on pourra aller à la police ? demanda-t-elle.

— Je t’ai dit pour la police.

— OK, OK. Les autorités. La DEA. Le FBI. Quelqu’un de compétent. Tu dis que si on met la main sur les dossiers financiers de Josh, on aura de quoi le confondre ?

— C’est ce que j’espère. Pourquoi ? Tu as une idée ?

Elle baissa les yeux sur la table en ressentant une pointe de culpabilité pour le plan qui germait dans son esprit. Elle était amie avec Cecelia depuis le collège.

— Laisse-moi y réfléchir encore un peu, déclara-t-elle. Je te tiendrai au courant.

 

Après leur entraînement au champ de tir, Feenie persuada Marco de la déposer au journal en promettant de ne pas mettre un pied en dehors du bâtiment. Le fait qu’elle n’ait pas de moyen de transport dut le convaincre, car sa voiture était toujours garée devant chez elle sur Pecan Street. Ils avaient convenu que c’était la meilleure place où la laisser, pour éviter d’attirer l’attention sur son nouveau logement.

Marco se gara devant l’immeuble de la Gazette et inspecta minutieusement les lieux. Feenie était certaine d’être en sécurité. Personne ne s’attendrait à ce qu’elle se présente au journal un samedi, et les détours pénibles qu’ils avaient faits à travers la ville avaient éliminé la possibilité d’une filature.

— Je reviens à quatre heures, dit-il. Ne t’en va pas.

Elle tendit la main vers la poignée, mais il la tira en arrière.

— Hé, dit-il avant de l’embrasser.

Son baiser fut ferme et possessif.

— Je suis sérieux. Sois prudente.

Alors qu’elle glissait sa carte dans la fente de la porte principale, elle se demanda dans quoi elle était en train de s’embarquer. Rien dans sa façon de la traiter ne semblait désinvolte, et pourtant, elle savait qu’il ne fallait pas s’attendre à un engagement de la part d’un type qui vivait sur un bateau. Ce qu’il ressentait pour elle, quoi que ce soit, était intense mais temporaire. Tout comme son intérêt à elle pour lui.

Ouais, c’est ça.

Elle atteignit le haut des escaliers au moment où Grimes sortait de son bureau.

— Qu’est-ce qui vous amène un samedi ? demanda-t-il.

Elle plaqua un sourire sur son visage.

— Je veux juste fignoler mon article pour demain.

Le responsable de la rubrique lui avait demandé un papier approfondi sur l’histoire du lycée, et elle n’avait pas eu le temps de la finir parce qu’elle s’était concentrée sur Marco.

Grimes, qui la regardait d’une expression neutre, fronça finalement les sourcils.

— Qu’est-ce qui vous est arrivé au visage ?

Elle effleura sa pommette. Elle l’avait dissimulée avec du fond de teint, mais elle devait penser à mettre un pansement sur sa coupure.

— Je me suis pris une porte.

Sceptique, Grimes haussa un sourcil et se dirigea vers la salle de pause.

La salle de rédaction était déserte, à l’exception des types de la rubrique des sports et du responsable de rubrique qui lui avait donné une deadline pour le milieu d’après-midi. Feenie s’installa à son bureau et se mit au travail. Elle revint sur son ébauche d’article, fit quelques révisions, puis l’envoya au rédacteur pour qu’il y jette un œil. Tandis qu’elle attendait ses commentaires, elle rédigea un papier sur un mariage qui avait lieu la semaine suivante, et son esprit vagabonda vers le projet qu’elle était en train de mettre au point.

À la place de Robert Strickland, où garderait-elle des documents sensibles ? Elle le connaissait depuis presque une décennie, et il jetait rarement quoi que ce soit. Cecelia se plaignait souvent que leur garage ressemblait à une remise pour outils et gadgets indésirables. Il lisait les modes d’emploi et les gardait dans un dossier longtemps après avoir appris à faire marcher les appareils correspondants.

Robert ne jetterait pas quelque chose d’aussi important que les dossiers financiers d’un ancien client. Mais où les rangeait-il ? Pas au travail, espérait Feenie. Elle n’avait pas la moindre chance de se faufiler dans les bureaux huppés du cabinet d’expert-comptable de Robert. Mais elle doutait qu’il les ai rangés là s’il connaissait leur contenu. Si les documents indiquaient des activités illégales, il ne les laisserait certainement pas là où quelqu’un de son bureau risquerait de tomber dessus. Feenie se passa mentalement le plan du rez-de-chaussée de la maison de Cecelia. Robert et elle avaient fait installer un coffre des années auparavant, mais Feenie n’avait aucune idée de son emplacement, et de toute façon, elle était incapable de forcer un coffre. Elle était à peu près certaine qu’il y avait des classeurs dans le bureau de Robert, mais ça semblait être une cachette bien trop évidente, même pour un cerveau logique comme Robert. Le grenier, peut-être ?

Le téléphone de Feenie bourdonna, coupant court à ses pensées. Le numéro lui indiqua qu’il s’agissait de Cecelia et elle se sentit instantanément coupable.

— Salut, Celie. Quoi de neuf ?

— À toi de me le dire. Comment ça s’est passé la nuit dernière avec ton flic ?

Feenie avait confié à Cecelia qu’elle avait rendez-vous avec Marco la veille au soir. Contrairement à McAllister, Cecelia l’avait crue.

— Il n’est pas à moi. Et il n’est pas flic.

— Feenie…

Sa voix s’anima.

— Hein ?

— Je le savais ! Tu as couché avec lui ! C’était comment ?

— C’était comment quoi ? demanda-t-elle pour esquiver.

Elle avait toujours été très ouverte avec Cecelia en matière d’affaires de cœur – et de lit – mais cette fois, les détails resteraient privés.

— Le sexe, Feenie ! Seigneur ! Je parie que c’était génial, non ? Cet homme est splendide !

— Je n’ai vraiment pas…

— Arrête tout de suite ! Je veux l’entendre en personne. Allons chez Rosie boire une margarita.

— Je viens d’y déjeuner.

Quelques secondes s’écoulèrent, le temps que Cecelia digère la nouvelle.

— Vous avez pris votre petit-déjeuner ensemble ? C’est trop mignon ! Il faut que tu viennes, Feen. Robert a une partie de golf et on pourra boire une bière au bord de la piscine. Je veux tout savoir.

Son sœur se serra. C’était pile l’occasion dont elle avait besoin pour se rendre chez Cecelia et fureter dans sa maison. Elle se sentait horriblement mal. Mais elle se souvint des filles sur le bateau de Josh et repoussa ses réserves. Elle jeta un coup d’œil à l’horloge de la salle de rédaction.

— Je suis à la Gazette, là. Je dois boucler quelque chose d’abord, et je n’ai pas ma voiture. Tu peux venir me prendre vers une heure ?

Ça lui laisserait quelques heures pour passer du temps avec Cecelia et revenir au bureau avant l’arrivée de Marco.

— À une heure. Je serai là.

Une heure plus tard, Feenie était assise au bord de la piscine de Cecelia, épuisée par la gymnastique, étrange et éprouvante, de devoir parler avec son amie sans lui révéler ce qui se passait réellement dans sa vie. Elle avala la dernière gorgée de sa Corona et rassembla son courage.

— Ça t’embête si j’en prends une autre ?

— J’y vais, dit Cecelia depuis sa chaise longue.

Elle portait des lunettes de soleil et un bikini bleu, et sa peau était badigeonnée d’huile solaire.

— Non, j’y vais. Je dois aller aux toilettes de toute façon.

Cecelia haussa les épaules et lui tendit sa bière vide.

— Ramène-m’en une aussi, alors. Il y a du citron sur le comptoir.

Feenie rapporta les bouteilles dans la cuisine et les jeta dans la corbeille de recyclage. Puis elle se dirigea vers la salle de bains des invités juste à côté du bureau de Robert.

Elle passa la tête dans l’encadrement de la porte et parcourut des yeux la pièce, décorée de façon très masculine, mobilier en bois sombre et rembourrage en cuir. Tout semblait en ordre, depuis les étagères méticuleusement organisées jusqu’à la pile de dossiers posée au coin de son bureau en acajou. Elle ouvrit l’un des tiroirs lambrissés d’acajou du bureau. Il était rempli de document.

Elle parcourut les dossiers du regard. Ils étaient rangés par ordre alphabétique. Cependant, toutes les étiquettes indiquaient qu’il s’agissait de sujets personnels. Après avoir vérifié la lettre G, elle ferma le tiroir et essaya celui d’à côté.

Le deuxième tiroir contenait des dossiers financiers. Elle feuilleta les documents, mais ils étaient tous liés aux finances personnelles de Cecelia et Robert. Il n’y avait rien sur Josh, ni sur aucun autre client de Robert, d’ailleurs.

Feenie referma le tiroir et regarda de nouveau autour d’elle. Une caméra numérique était posée sur la bibliothèque, qui contenait la coûteuse collection de vidéos amateurs de Robert – classées par ordre alphabétique, bien sûr – et ses DVD. Elle parcourut brièvement les étagères. Elles prouvaient que Robert était un vrai cinéphile, certes, mais ce n’était pas nouveau. Il possédait également une étagère entière de VHS. Elle lut les tranches. Il s’agissait de film amateurs, principalement de leurs vacances. Feenie reconnut certaines des destinations – Las Brisas, Cozumel, les Caïmans. Elle repéra une étiquette qui indiquait « Monterrey » et fronça les sourcils. Elle ne savait pas que Cecelia et Robert y étaient allés en vacances. Elle retira la cassette de l’étagère et la sortit de sa boîte.

Mais au lieu d’un film maison, la boîte contenait une production professionnelle avec la photo d’une rouquine qui ne portait qu’un chapeau de cow-boy pour tout vêtement. Les exxxxxxcitantes renaaaardes du Texxxxas. Oups. Elle ne s’était pas attendue à ça de la part du comptable collet monté.

Elle remit rapidement la cassette à sa place et regarda par-dessus son épaule. Elle était définitivement en train de violer leur vie privée, et ça ne la faisait pas rire. Elle jeta un coup d’œil à sa montre. Bon sang. Elle était partie depuis presque dix minutes, et Cecelia allait probablement se demander ce qui la retenait si longtemps. Feenie sortit du bureau de Robert sur la pointe des pieds, à la fois déçue et soulagée. Elle n’avait trouvé aucun papier incriminant, mais elle avait fait de son mieux. Si Marco voulait trouver d’autres saletés sur Robert, il allait devoir les déterrer lui-même.

 

Cecelia déposa Feenie devant le journal.

— Bonne chance ce soir, dit-elle avec un sourire entendu.

— De la chance ?

Cecelia la regarda par-dessus ses lunettes.

— Juarez. Tu dors encore sur son bateau cette nuit, non ?

— Oui, j’imagine. On en a pas vraiment parlé.

— Crois-moi, tu y seras. On dirait qu’il est fou de toi. Il a déjà probablement brûlé son petit carnet noir.

Feenie ouvrit la portière.

— Non, je crois pas. D’après ce que j’ai pu voir, sa notion de l’engagement, c’est une boîte de capotes.

— N’en sois pas si sûre. Tu es pratiquement en train d’emménager, non ? Et il n’a même pas eu à demander. Je pense qu’il est sérieux avec toi.

— Je reste chez lui pour des raisons de sécurité, lui rappela Feenie.

— Des raisons de sécurité. Hum-hum.

Elle lui fit un clin d’œil.

— Comme c’est pratique.

Feenie la regarda s’éloigner en soupirant. Elle avait raison, du moins pour l’histoire de l’emménagement. Il n’avait pas demandé. Forcée était plus le mot juste. Il avait fait son sac pour elle, plongé ses mains dans ses tiroirs privés pour prendre chaussettes, sous-vêtements et T-shirts tandis qu’elle le regardait faire en argumentant. Il ne lui avait prêté aucune attention. Cet homme ne prenait jamais de « non » pour une réponse, surtout quand il s’agissait d’elle. Et maintenant, ils vivaient ensemble.

Peut-être devait-elle mettre de la distance entre Marco et elle, et calmer les choses. Sa libido surchauffée ne l’aidait pas vraiment à prendre des décisions intelligentes.

Elle sortit sa carte magnétique de son sac et se dirigea à grands pas vers la porte vitrée de l’immeuble de la Gazette.

Pop.

La vitre explosa et Feenie tomba par terre. Pop. Pop.

Son cerveau identifia le son, mais son corps fut plus lent à réagir Puis elle s’entendit crier. Elle sentit ses mains et ses genoux érafler le béton tandis qu’elle rampait derrière un lampadaire pour essayer de se cacher.

Elle allait mourir juste là, en plein jour !

Où était son arme ? Elle fouilla fébrilement dans son sac.

Un SUV sombre freina en crissant des pneus à quelques mètres de sa cachette. La Chevy Blazer. Oh, Seigneur.

Un homme bondit hors du véhicule, l’arme tendue, et se mit à courir vers elle.